Séminaire Trace, information, écriture


Séance du 15 décembre 2022
La verticale d’horizon

De 18h à 20h en visioconférence : https://zoom.us/my/didier.vaudene

Bien que la métaphore de la verticalité ait été déjà maintes fois utilisée, l’accent donné ici aux médiations (traces, parole, écriture, etc.) et aux constructions fictionnelles (y compris dans des contextes théoriques) permet de l’aborder d’une manière renouvelée dans son articulation avec la platitude. Dire que la platitude est plate, ce n’est pas constater une réalité spatialement ou géométriquement plate ; c’est apercevoir un effet associé à l’intervention de médiations, c’est-à-dire in fine à l’articulation entre des conditions de possibilité et des effets de limitation. En ce sens, la verticalité n’est qu’une manière de figurer ce qui excède la platitude et ses horizons, une altérité autrement qu’horizontale, autrement qu’au loin, là-bas.

La platitude est un nid d’oiseau tissé de brindilles, une bibliothèque de Babel à la Borges, l’entrelacs des voix et des discours, ce vide papier que la blancheur défend, le film embobiné du cinématographe, le fil du téléphone ou la liaison série du réseau, etc., autant de brindilles, de fragments, de segments, ou d’éclats tissant la texture de la platitude quand ils se sont glissés dans le défilé linéaire d’une médiation. Cette linéarité, à son tour, n’est pas le constat d’une rectitude spatiale ou géométrique, mais un effet de neutralisation qui est obtenu lorsque ce qui demeure en retrait, qui tout à la fois conditionne et limite une médiation, ne subsiste, au mieux, que sous la forme d’entre-deux ou de liaisons d’une seule espèce (comme le flux voisé, les blancs de l’écriture, la linéarité théorique d’un corpus formalisé ou la pellicule du cinématographe, par exemple).

Ce premier degré de compréhension de la platitude ouvre, de manière générale, sur des problématiques de changement de niveaux, de régressions sans fin et d’effectivité : on imagine la verticalité comme la stratification d’un feuilletage, comme s’il y avait plusieurs niveaux de platitude horizontale. Toutefois, l’écrasement ou la compression de plusieurs niveaux dans une platitude résiste comme un reste dont la trace est aperçue comme ce qui subsiste en retrait dans les « blancs » de cette platitude. Le second degré de compréhension de la platitude, à l’inverse, prend appui sur une platitude pour tenter de lui donner une verticalité qui s’y projetterait ou s’y comprimerait sans laisser de trace décelable. C’est le pari des interprètes, un pari pascalien qui ouvre sur diverses problématiques, d’altérité, d’événementialité, de temporalisation et de phénoménalisation, mais aussi de constructions fictionnelles et d’effets d’insu, par exemple.